Aller au contenu principal

Louis SERRURIER (1659-1716) et Louis LOURDIN (v. 1670-1709) de La Trétoire
étaient officiers de la vénerie du roi Louis XIV.


Après avoir retrouvé Mathilde Mirat épouse du grand poète allemand Henri Heine, et fourni quelques éléments sur la vie des maires de La Trétoire, Denis Sarazin-Charpentuier, historien de la Brie, se penche sur deux habitants de La Trétoire qui étaient au service de Louis XIV.


Comme un de mes arrière-grands-pères est né à La Trétoire en 1865, je me suis « amusé » à retrouver ses ancêtres qui me rattachent à toutes les anciennes familles du secteur : Houdrichon, Taroux, Munérat, Mutel, Lourdin, Delétain, Chérier, Paris, Clozier, Seningant, Gutel, Simon, Nitot, Moussin, Serrurier et Cuisinier.
Tous ces aïeux étaient en majorité laboureurs, cultivateurs, à Launoy, à Champlabride, au Vinot, à Bois-Baudry, aux Viels Courts. Il y avait aussi des maçons, des manouvriers, des sabotiers, des vignerons.


Ceux qui m’ont intrigué le plus longtemps, ce sont cependant Louis Serrurier (1658-1716) et Louis Lourdin (v. 1670-1709), que je trouvais qualifiés dans les registres paroissiaux d’ « officier du roi », d’« officier chez le roi » ou bien « officier de la vénerie du roi » !
Des officiers du roi.

Que pouvaient-ils bien faire à la Cour de Louis XIV ?
Louis Serrurier (1659-1716) était le fils de Gilles Serrurier (v.1617-1683), laboureur à La Trétoire, et de Marie Lourdin (1641-1682). En 1682, il se marie à La Trétoire avec Anne Cuisinier (1663-1725). Il exerce alors la profession de laboureur, c’est-à-dire qu’il cultive ses terres et qu’il a son propre matériel.

 Mais en 1706, il est présent lors d’un mariage comme « officier du roy ». « ...en présence de Louis Serrurier officier du roy, et Martin Serrurier son fils » Quand il meurt en 1716, on parle de « Louis Serrurier vivant officier du Roy ». « Louis Serrurier vivant officier du Roy »
Signature de Louis Serrurier le 27 octobre 1686.


Quant à Louis Lourdin, il se marie en 1694 à Saint-Denis-lès-Rebais avec Marie Fosse (1671-1730). Il est enterré dans l’église de la Trétoire le 11 avril 1709  comme cela se faisait à l’époque pour les notables. Quand Marie Fosse rend son âme à Dieu en 1730, elle est dite veuve de « Louis Lourdin vivant officier chez le Roy ».
« Louis Lourdin vivant officier chez le Roy »


Tous les deux figurent comme officier du roi dans « L’Etat de la France », le Bottin administratif au temps de Louis XIV, où les personnels au service du roi étaient mentionnés.
On y trouve donc au sein de la vénerie du roi, Loüis Serrurier, qui était « valet de chiens par quartier de janvier » de 1699 à 1712, avec des gages de 100 livres. Il y est cité en 1702, 1708, 1712.
1702« Autres Valets de Chiens par quartier 100, livres
En janvier Loüis Serrurier »1706


De même Loüis Lourdin est à ses côtés en 1706 puis en 1708, également comme valet de chien pour le quartier  d’avril, c'est-à-dire le deuxième trimestre de l’année. Ils étaient « officiers du roi », ce qui leur permettait d’avoir quelques avantages fiscaux.


La vénerie.
Il convient de dire quelques mots sur la vénerie qui était l’art de chasser avec un équipage et une meute de chiens courants. Ces chasses à courre du roi avaient pour rôle, en temps de paix, d’entretenir les qualités guerrières des souverains et des courtisans.

Sous le roi Louis XIV, la grande vénerie se développa considérablement. Le fils du mémorialiste, François VII de La Rochefoucauld (1634-1714), grand veneur, alors le « patron » de Louis Serrurier et Louis Lourdin, n’avait pas moins de 500 titulaires sous ses ordres !


L’équipage du cerf, le plus prestigieux, était le plus nombreux : on y comptait des lieutenants, piqueurs, pages, valets de limiers, valets de chiens, fourriers, maréchaux, chirurgiens, castreur de chiens, aumônier, trésorier, contrôleur.

 Les meutes comptaient 200 chiens : chiens blancs dits greffiers, et chiens normands.


Le valet de chiens.
Dans ce dispositif, le valet de chiens par quartier était l’auxiliaire du piqueur. Cet officier (titulaire d’un office) venait servir pendant trois mois le roi lors des chasses royales à Versailles et dans les autres domaines royaux. 

Il était logé dans le chenil du roi à Versailles, ou bien dans des baraques proches. Il pouvait aussi faire partie d’une capitainerie en province. Le valet de chiens percevait des gages, de la nourriture et de la monnaie de voyage. Lors de la Saint-Hubert, il offrait des brioches aux courtisans contre un pourboire.


Il est à noter que la femme de Louis Serrurier, Anne Cuisinier, était probablement la fille de Robert Cuisinier dit Gassion, valet de chiens par quartier en 1686 et en 1698. Louis Serrurier lui aurait succédé dans cette charge en 1699. Les circonstances du recrutement de Louis Serrurier et Louis Lourdin ne sont pas connues. 

Ce qui est sûr, c’est qu’ils se transmettaient cette charge dans la famille, allaient servir à Versailles trois mois, et exploitaient leurs terres le reste du temps. Ils étaient de tout petits notables du fait de leur fonction à la Cour. L’histoire les avait bien oubliés, car, qui aurait pu croire que deux habitants de La Trétoire étaient au service du Roi Soleil ? !


Denis Sarazin-Charpentier


Annexe : combien gagnaient-ils ? C’est une bonne question ! Il suffit de se reporter à " L'État de la France, contant tous les Princes, Ducs & Pairs & Maréchaux de France, et autres officiers de la couronne " publié en 1702 ! Les diverses fonctions à la cour y sont décrites brièvement, et l’on peut savoir combien était rémunérée chaque fonction, avec une somme en livres. Les échelles de comparaisons permettent de savoir que Louis Serrurier et Louis Lourdin étaient payés sans excès.


CHAPITRE VIII.
Des plaisirs du Roy (= les chasses du Roi)
« On faisoit autrefois deux grandes Chasses l’année, à l’issuë des Parlements, ou Assises, qui ne se tenoient que deux fois l’an ».
Du Grand Veneur. Celui qui posséde aujourd’huy cette Charge, est François Duc de la Rochefoucault
Pour son état & appointement, 10 000 livres. Pour la nourriture & dépense des chiens, 6387. liv.10. s.

somme totale 17 587.liv10s
Lieutenant ordinaire de la Vénerie………………………………………………………….……………1 000.liv
Quatre Lieutenans de la Vénerie, servans par quartier, ausquels le Roy pourvoit, 1 000.liv
Quatre autres Lieutenans …………………………………………………………………………..……     2 000.liv par an
Quatre Soû-Lieutenans de la Vénerie, servans par quartier, ……………………………………500.liv
Un autre Soû-Lieutenant, pour la conservation des bestes fauves & du gibier, ……   300.liv
Quarante-quatre Gentils-hommes de la Vénerie, ……………………………………………………  300.liv
Trois autres Gentils-hommes ordinaires, servans à la Vénerie, païez sur la Cassette.
Un Valet de Chiens ordinaire à cheval, …………………………………………………………………....  400.liv
Quatre Maîtres Valets de Chiens à cheval, par quartier, …………………………………………… 200.liv
Deux Pages, …………………………………………………………………………………………  600.liv
Quatre Fouriers, ……………………………………………………………………………………  150.liv
Dix-huit Valets de Limiers, ………………………………………………………………………150.liv
Autres Valets de Chiens par quartier, …………………………………….....100.liv
Deux Marêchaux ferrans, …………………………………………………………………………  75.liv 
Un Chirugien, …………………………………………………………………………………………  150.liv
Un Châtreur de Chiens, & guérisseur de rage, ……………………………………     100.liv
Compagnie de Gardes à cheval des Chasses & Plaisirs du Roy en ladite Vénerie, pour la conservation
des bêtes fauves & gibiers, des plaines, bois & buissons des environs, & dix lieuës à la ronde de la
Ville de Paris, sous la charge de M. le Duc de la Rochefoucault, Grand Veneur
Le Lieutenant, …………………………………………………………………………………………  600.liv
Le Soû-Lieutenant, …………………………………………………………………………………   300.liv
Gardes à cheval, ………………………………………………………………………………………  150.liv chacun
Un Aumônier ordinaire, païé sur la Cassette, …………………………………………… 600.liv
 

Sources :
Trabouillet, L. (éd), L'État de la France, contant tous les Princes, Ducs & Pairs & Maréchaux de France, et autres officiers de la couronne (...), Paris, Charles Osmont, 1702, 3 vol. ; vol. 1, p.15-668.
Edité en ligne par le Centre de recherche du château de Versailles, Versailles, 2009 : http://chateauversailles-recherche.fr/curia/documents/roi1683.pdf.